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Bbox/quadruple play : l’abonnement des néophytes

Une belle promesse. Voilà ce qu’était la sortie de Bouygues avec sa Bobx et son offre quadruple-play. Quelques neuf mois plus tard, il faut malheureusement employer le passé car les promesses faites n’ont été que partiellement respectées. Si l’offre a indéniablement l’avantage de la simplicité et du prix pour les utilisateurs lambda, la Bbox se révèle un cauchemar dès lors que l’on veut pousser plus avant les possibilités de la machine.

500 000 clients. Bouygues annonçait fièrement, fin mars 2010, avoir convaincu 500 000 particuliers ou entreprises de s’abonner à sa nouvelle offre « Quadruple play », c’est-à-dire triple play + téléphonie mobile. Une réussite ? Commercialement, c’est incontestable. Mais qu’adviendra-t-il dans les prochains mois ? Qu’arrivera-t-il quand Bouygues aura atteint ce qu’il considère comme un quota financier rentable ? Ces offres affichant un tarif très compétitif ne seront-elles pas remises en cause ? Cela étant, avant toutes ces spéculations, la question qui prime reste : l’offre de Bouygues est-elle digne d’intérêt ?

Connexion et très haut débit : l’illimité limité

Pour bien comprendre de quoi il en retourne, il faut tout d’abord connaître le postulat classique des offres incluant l’Internet mobile : le tout illimité est en réalité intégralement limité. Le débit se détériore après 500Mo de données échangées, et le surf après cette limite devient un enfer. Or, 500 Mo, c’est deux heures de télévision mobile, quelques mails échangés et basta !

Une limitation critiquable à plus d’un titre. Pour rire d’abord, on rappellera que TF1 appartient au groupe Bouygues, et que son application est disponible sur les mobiles… Plus sérieusement ensuite, l’Internet mobile dépassera l’Internet fixe dans 5 ans. Un changement majeur qui induit un même bouleversement de la part des opérateurs. Pour l’instant, c’est à se demander si les opérateurs ont bien mesurer cette révolution. Pour profiter pleinement de la Bbox, au moins concernant le mobile, il vaut mieux être « télévisionphobe », donc… Certes, tel est le cas pour tous les opérateurs, mais Bouygues se doit de tenir son rang s’il se revendique porteur d’innovations.

Ensuite, si la fibre optique est prévue pour ces offres, c’est en réalité un leurre. Bouygues ne peut offrir la fibre optique uniquement là où les infrastructures le permettent. L’offre de Bouygues, concernant son très haut débit, sera donc uniquement appréciable par une clientèle réduite à une minorité de la population. Rappelons cependant que Bouygues utilise le câblage de Numéricable pour ses offres Internet, un câblage qui est limité, même s’il progresse et n’est plus cantonné à un petit nombre de grandes villes.

Un prix cache-sexe

Par ailleurs, le prix de l’abonnement, apparemment compétitif, est le résultat d’un habile tour de passe-passe. Indépendamment des habituels frais de location ou d’achat de la box et des éventuels mensualités payées pour rien à cause d’un démarrage douloureux, les 30 euros proposés pour la partie Internet du forfait sont compensés par l’investissement dans la téléphonie mobile.

En clair, maintenant qu’il est acté que les FAI sont en capacité de proposer des offres triple-play à 20 euros par mois (notamment Numéricable et Alice), les 10 euros restant sont soient empochés directement par le FAI soit compensés par une offre de consommation supplémentaire, ici le forfait de téléphone portable. Un forfait grâce auquel les opérateurs peuvent toujours engranger des gains conséquents, notamment en raison des dépassements de forfait (pourtant « illimités ») ; dépassement de la connexion Internet ou dépassement des numéros appelés (129 au maximum par mois).

Par ailleurs le principal argument de vente est d’économiser sur son forfait téléphonique, qui peut parfois dépasser les 70 euros, l’abonnement quadruple-play étant à 99 euros le mois, abonnement téléphonique compris. Mais l’internet mobile de Bouygues n’offre aucun avantage particulier, puisque le débit baisse après 500Mo, à l’instar peu ou prou de tous les opérateurs. Sauf à avoir un forfait dépassant les 60 euros, c’est l’intégralité du nouvel abonnement de Bouygues qui devient peu intéressant, puisque ses autres composantes sont peu ou pas novatrices (Internet + fixe + TV à 30 euros).

Abonnement quadruple-play : aspirine, paracétamol, dictionnaire et patience

Enfin et surtout, la Bbox a tout l’air d’un produit manifestement inachevé. Offrant des possibilités très alléchantes, la box déçoit pourtant dès lors que l’utilisateur sort des sentiers battus, c’est-à-dire du simple surf. Pour profiter plus avant de la machine, seuls les techniciens cadres de Bouygues s’en sortiront. Et encore : il leur faudra avoir un bon tube d’aspirine et être multilingues : la traduction de l’interface est incomplète et explorer les fonctions de routeurs revient à se plonger dans un labyrinthe dont on ressortira exténué, sans pour autant avoir trouvé la sortie.

Si l’ensemble est donc pour partie décevant, l’offre quadruple-play de Bouygues a néanmoins le mérite de pousser à l’écrasement des prix, au bousculement des dinosaures du secteur, et même – rêvons – à l’innovation. Si ses 500 000 clients sont une incontestable réussite, Bouygues n’a cependant aucun espoir de convaincre les technophiles avec sa box outrageusement complexe d’utilisation dès lors que l’on veut explorer les routeurs (moduler sa box devient néanmoins, depuis peu, une fonction permise plus facilement par certains opérateurs).

A l’objectif d’atteindre un grand public grâce à une accessibilité simple, tout en touchant les professionnels ou amateurs passionnés grâce à des possibilités assez avancés, Bouygues s’arrêtent à mi-chemin. Une constatation pas illogique sur le plan financier – le grand public représente le tiroir caisse – mais regrettable sur le plan technique. Gageons néanmoins que Bouygues se rattrapera via les mises à jour qu’elle ne tardera pas à réaliser.

PS : Si Bouygues a lancé le mouvement et que les autres opérateurs (Orange et SFR) ont suivi, Free est en panne sèche sur ce nouveau marché, pourtant porteur. Déjà plutôt mal en point, l’opérateur d’Iliad pourrait bien mourir à cause de cet échec industriel qu’est le retard au lancement du quadruple-play. Le marché étant verrouillé par les grands opérateurs, a fortiori quand Free se lancera (en 2012), la seule solution pour percer sera d’écraser considérablement des prix par ailleurs déjà bien bas. Mais Free a-t-il encore les moyens de cette ambition ?

Fantasfibre